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Limeyrat, Village en Poésie

2017 : Afrique(s)

, 16:54pm

Publié par Printemps des Poètes de Limeyrat

2017... Année "creuse" pour le village, mais nous avons fêté le Printemps des Poètes avec la bibliothèque autour de l'exposition "Des images, des mots comme des baumes", associant photographies du collectif ZAFP, collectif de femmes photographes du Zimbabwe, traditionnellement exclues ou diminuées dans leur travail photographique. Intermédiaire Shayne Girardin.
Un montage audio, lecture de poèmes de femmes de nombreux pays africains accompagnait l'exposition. Choix, mise en voix et réalisation Josiane et Didier Ballesta.

L'affiche :

 

Le vernissage, vendredi 10 mars...

2017 : Afrique(s)
2017 : Afrique(s)

C'était le temps fort de l'expo avec, au programme :

 

la médiation fort appréciée de l'exposition de photographies par Shayne Girardin qui nous a donné quelques clés de compréhension du Zimbabwe,

la lecture à deux voix de poèmes de femmes africaines par Josiane et Didier Ballesta

puis Sandra à la harpe et Sacha au saxophone nous offraient un intermède musical inédit...

 

et pour finir, chacun des 50 participants a pu se régaler d'un buffet aux couleurs de l'Afrique.

 

Les poèmes lus ce soir-là :

Leur lecture à deux voix par Josiane et Didier Ballesta :

Pour une petite idée de l'expo, une vidéo bien imparfaite...

L'affiche nationale

 

                   Il est des mots comme des baumes


Je suis Lucy, la grand-mère de tous
Je suis la mère putative de toute l’humanité
Je suis ta black Athéna, je suis ta Tsipora, je
suis ta reine de Saba
Mon teint mystérieux, mon regard lumineux, mon
sourire radieux
Me viennent de Tiyi, et son amant le dieu Amon.
Je suis la soeur d’Akhénaton
Je suis Hapshepsout Néfertiti Néfertari
Cléopatre
Je suis la reine Pokou, la reine Zingha, la
princesse Yennenga
Je suis Sogolon Konte, la femme-buffle mère de
Soundiata Keita


     Il est des mots comme des baumes
     Ils adoucissent et laissent un goût de menthe


Je suis Nandi, mère de Chaka Zulu
Je suis Nanga, l’amazone du Bénin
Je suis la mère de l’enfant soldat
Je suis la Soninké portant ton bébé
Je suis la Malinké promenant ta grand-mère dans
le parc
Je suis la sueur de ton front
Je suis la mère du temps
Femme
Noire
C’est ma triple victoire.


      Il est des mots comme des baumes
      Ils adoucissent et laissent un goût de menthe
      Il est des regards comme de la laine d’agneau
      Ils enveloppent et réchauffent dans la caresse


Dès que le soir étreint la terre
Et la berce de ses bras noirs
Le souvenir de nos misères
Revient nous voir...
Tout ce qui fut peine, détresse
Espoirs d’hier, chagrins nouveaux
En foule pleurante se presse
Autour des nids, près des berceaux


Dormez, dormez
Tout le village est assoupi
Dormez, dormez
Seule au loin, Mourou la Panthère
Jette sa plainte dans la nuit


        Il est des mots comme des baumes
        Ils adoucissent et laissent un goût de menthe
        Il est des regards comme de la laine d’agneau
        Ils enveloppent et réchauffent dans la caresse
        Il est des sourires comme des pleines lunes
        Ils illuminent avec intimité.


J’avais une hutte de paille
Qui m’abritait depuis longtemps
Mais on en fit, après ripaille
un feu géant
Et pendant la saison dernière
Le large fleuve a débordé
Notre récolte toute entière
Tout fut noyé, Tout fut noyé.


Dormez, dormez
Tout le village est assoupi
Dormez, dormez
Seule au loin, Mourou la Panthère
Jette sa plainte dans la nuit


        Il est des promiscuités enivrantes
        Et des frôlements comme des caresses de soleil


Tout cela n’est rien : J’étais Mère
Mais le Grand Sommeil est passé
Et j’ai moi-même mis en terre
Mon dernier né.
Et depuis lors, devant ma porte
Donnant mon coeur, donnant mes bras
Je berce l’enfant qu’on m’apporte
Lorsque la maman n’est plus là


Dormez, dormez
Tout le village est assoupi
Dormez, dormez
Seule au loin, Mourou la Panthère
Jette sa plainte dans la nuit.


         Il est des promiscuités enivrantes
         Et des frôlements comme des caresses de soleil
         Furtives et discrètes et excitantes
         Elles laissent un goût d’attente !


Hantée par l'Iboga
Autour de l'okoumé je danse
Torche indigène que nul ne peut étouffer.
Et voici que renaissent en moi
Le Bwiti, l’Ilombo, l’Ikoku et le Ndjembè.


         Il est des caresses alarmantes
         Qui laissent sur le qui-vive !


Maquillée par le kaolin rouge et noir
Je chante ma négritude dans sa lucidité.
Venez, venez à Imogu savourer sans fin
Les délices soniques de notre tam-tam,
le tam-tam ancestral inviolé.


        Il est des caresses alarmantes
        Qui laissent sur le qui-vive !
        Il est des noms qui augurent du destin
        Et des phrases comme des décrets


Le raphia ceint mes reins
Les battements des mains
Ponctuent la cadence envoûtante
Et je sens le vampire de Bwiti,
de l’Ilombo, de l’Ikoku et du Ndjembè
Vaciller en face, en face de moi.


Je peux enfin goûter au folklore du terroir
Et aux belles couleurs de la LIBERTÉ.


          Il est des mots comme des baumes
          Ils adoucissent et laissent un goût de menthe


Raconte-moi
La parole du griot
Qui chante l'Afrique
Des temps immémoriaux
Il dit
Ces rois patients
Sur les cimes du silence
Et la beauté des vieux
Aux sourires fanés


           Il est des visages comme des proverbes
           Énigmatiques et symboliques


Mon passé revenu
Du fond de ma mémoire
Comme un serpent totem
À mes chevilles lié
Ma solitude
Et mes espoirs brisés
Qu'apporterais-je
À mes enfants
Si j'ai perdu leur âme?


           Il est des visages comme des proverbes
           Énigmatiques et symboliques
           Ils appellent à la sagesse
           Parce que la vie c’est l’avenir
           Et que l’avenir c’est toi.


Apprends-moi
L’air des prairies bleues
Et souffle à mon oreille
Ton haleine princière
Il y a tant de mots
Sous la poussière
Tant d’amours
Dans les tiroirs
J’ai mal à croire
Que les feux de brousse
Sont éteints.


            Il est des beautés merveilleuses
            Présentes et nombreuses là
            Sur le nez là sous nos yeux.


interchangeables sont mes sens,
entendre des couleurs, écouter des odeurs :
l’écarlate retentit, le poivre est
pizzicato et le brun roulement de tambour.


            Il est des mots comme des baumes


Et l’été, l’été surtout s’engouffre
par le nez : le soleil est lessive bouillonnante.
Telle l’huile de laine l’air chaud me surprend,
comme la sueur des guerriers quand fument
les oignons dans une marmite.


           Il est des regards comme de la laine d’agneau


Et quelqu’un
est là, si fin-sensuel-sain
qu’il est, dans son sommeil, muscade et lait
tiède,
éveillé, août en flamme
dans une pinède-cigale.


           Il est des sourires comme des pleines lunes


Dans tes mains
Brûlait
la barque d’écume
le filet


dans tes mains ruisselait
la langue de feu
la soif


dans tes mains
on sentait
le pli du vent
la fièvre


           Il est des promiscuités enivrantes


dans tes mains
tremblait
le nom de la vie
le temps


Dans tes mains
Le monde
Et rien d’autre
Ni même le jour
Ne pouvait être plus parfait


Tu étais l’animal cendré
De l’entrelacement des limons
Celui de la multitude
Celui qui glissait dans l’eau
Comme l’ombre


            Il est des caresses alarmantes


Sur le grand fleuve où l’hippo nage
Nous pagayons
Et lançons vers chaque rivage
Le doux refrain de nos chansons
Puisqu’il nous faut servir un maître
Nous préférons
Ramer sans fin, libres, que d’être
Un serviteur en sa maison.


Il donnera, chacun l’espère
Le but atteint
De l’argent, des étoffes claires
Ou bien du sel plein nos deux mains.


Et dans nos villages les femmes
Au corps si doux
Nous verseront le vin de palme
les plus belles seront à nous.


Quand la nuit tend ses voiles sombres
Le voyageur
Rêveur, écoute au fond des ombres
Chanter l’âme des pagayeurs.


           Il est des mots comme des baumes
           Ils adoucissent et laissent un goût de menthe
           Il est des regards comme de la laine d’agneau
           Ils enveloppent et réchauffent dans la caresse
           Il est des sourires comme des pleines lunes
           Ils illuminent avec intimité.
           Pouvoir !
           Pouvoir regarder
           Pour déceler
           Pouvoir deviner
           Pour sentir
           Et être heureux !

Les poèmes choisis ont été écrits par...
Ana Paula Tavares - Angola - Ngo Bôt - Cameroun - Werewere Liking - Cameroun - Nele Marian - Congo - Véronique Tadjo - Côte d’Ivoire - Judith Bidjongou-Mounguengui - Gabon - Sheila Cussons - Afrique du Sud